KOOMI

L’ARTISTE

KOOMI, l’inspiration…

« Ce fût d’abord un Big Bang émotionnel. Et comme le Big Bang, je ne sais pas précisément l’instant où tout cela s’est déclenché ». C’est ainsi que le sculpteur KOOMI, alias Thierry Rollin, exprime l’aube de sa naissance artistique.

Pourtant, s’il ne parvient pas à en expliquer le processus, il ne se souvient que trop de l’événement commun, universel, qui l’a soulevé comme une feuille perdue. « C’était le 02 septembre 2015. Comme toute la planète, je me suis
réveillé, confronté à cette image choquante, tragique, innommable. Celle de ce garçonnet de 3 ans, Aylan Kurdi, flottant comme un déchet, au gré des vagues sur une plage des rivages de Turquie
».

La vision de ce enfant syrien, fuyant avec sa famille la guerre que le régime de Bachar El’Assad impose à son peuple, rend l’homme de bientôt 50 ans honteux de son impuissance.

C’est alors que KOOMI, le sculpteur, s’insinue en lui et déploie sa rage de vivre, de s’exprimer et de tailler la matière. Sa première œuvre jaillit alors de ce chaos émotionnel : Laisse de Mer – Amor Fati.

Elle apparaît comme un déluge auquel Thierry Rollin, ancien élève de l’École Nationale des Arts Décoratifs de Limoges n’était pas préparé.

En effet, après le limousin et son terroir humide, le natif de Bar-le-Duc, prend la direction de la capitale et poursuit son cursus à l’École Louis Lumière.

Photographe passionné, c’est d’abord la lumière qui l’accapare. « C’est une matière presque immatérielle », explique-t-il malicieusement. « Dans mon métier de directeur de la photographie, ce sont des milliards de photons que j’ai essayé d’apprivoiser. Auxquels j’ai tenté, déjà, de donner une forme dans l’espace. Parce que dans le travail de la lumière, le volume est central ».

Alors quand KOOMI, son alter égo intérieur, surgit au détour d’un drame humain dont il ne parvient toujours pas à se détacher, Thierry Rollin cède la place au sculpteur.

Dans l’atelier qu’il a aménagé en sous-sol sur les bords de la Marne, à Joinville-le-Pont où il a ancré ses amarres, KOOMI n’a de cesse de créer, d’inventer, de donner forme et vie à cet élan créatif. « Mon émotion est essentiellement portée par les émotions plus que par des idées formelles. C’est un peu comme si j’étais aveugle. Tout passe et se fait par la sensation », confie le quinquagénaire aux yeux de ciel.

Ses œuvres impressionnent par leur masse posée sur un ancrage au sol puissant. « Les pièces doivent être aussi grandes que moi. J’ai besoin de ce rapport d’égal à égal. D’absence de domination. La représentation d’une jambe doit avoir la taille d’une jambe. Voire un peu plus », martèle-t’il dans un souffle.

Pourtant, lorsque l’on regarde l’une des pièces que KOOMI produit, l’on est aussi assailli par le sentiment d’une présence forte. Qui regarde qui ? Des êtres semblent prendre vie dans la matière. Nous invitant à l’empathie. Et l’envie de s’approcher, de se rapprocher est irrésistible, instantanée.

Cela dit, il ne s’agit en aucun cas de se limiter à ce que dit la surface des œuvres, comme le répète le sculpteur : « La forme vient du dedans. Je crois faire en sorte de souffler de l’intérieur pour atteindre un volume idéal. » Et pour ça, il accepte les défis qu’imposent les accidents des matières dures : « Je prends ce qui m’est offert », admet-il. Ainsi, les écarts des fibres de bois deviennent-ils le système vasculaire du personnage. Le nombril d’une femme enceinte naît du cœur de croissance d’une pièce de bois quand la granulosité de la pierre donne à la peau un semblant d’âge avancé.

« Beaucoup de mon expression artistique tient au dialogue que j’entretiens avec les sculptures. Tout commence avec la matière, puis avec le volume qu’elle engendre et enfin avec le personnage qu’elle dévoile. », précise-t’il. « Ce sont des sculptures du toucher, du contact », confie encore KOOMI. « Toutes les surfaces sont lisses, douces. Et l’envie de les caresser est alors inévitable. » Et, en effet, l’association du bois et du béton, si elle offre une densité imposante, se livre avec douceur.

Ainsi, née de la vision tragique d’un enfant mort sur une plage de Méditerranée, la vocation de Thierry Rollin a pris de l’ampleur.

Aujourd’hui, il se propose d’aller confronter son art lors de sa première exposition, à Deauville, où l’on pourra découvrir son travail.

Et laisser s’établir, à travers les rencontres, des dialogues où l’être sera central.

Une manière pour l’artiste de rappeler, par ses œuvres, et contre tout oubli, ce que chantait Barbara :
« Car un enfant qui pleure, qu’il soit de n’importe où
Est un enfant qui pleure.
Car un enfant qui meurt, au bout de vos fusils
Est un enfant qui meurt ».

© 2024 KOOMI

Thème par Anders Norén